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Les Jeux mondiaux des transplantés se poursuivent à Nancy malgré la mort d’un joueur

25 juillet 2003, Le Monde

C’est la première fois qu’ils se tiennent en France
La première édition en France des Jeux mondiaux des transplantés, à Nancy (Meurthe-et-Moselle), a été endeuillée, mercredi 23 juillet, par le décès d’un participant anglais. Transplanté du rein, médaille d’or de badminton aux précédents Jeux, à Kobé (Japon) en 2001, il est mort d’un arrêt cardiaque au quatrième jeu du match qu’il disputait. Il avait pourtant subi avec succès tous les tests médicaux préalables.

“En poursuivant les compétitions, les valeurs de générosité, de partage, de dépassement, exprimées et vécues par tous depuis le début de ces Jeux, seront le meilleur hommage qu’on puisse lui rendre”, a souligné la Fédération internationale des Jeux des transplantés, dans un communiqué.

La compétition, commencée samedi, se poursuivra comme prévu jusqu’au dimanche 27 juillet. Destinés à promouvoir le don d’organes, ces 14es Jeux réunissent 1 500 participants des cinq continents dans une douzaine de disciplines.

Ils ont débuté avec la Course d’Audrey, un parcours dans la ville, ouvert à tous. Audrey avait 14 ans lorsqu’elle est morte, percutée sur sa Mobylette voilà neuf ans. Sans hésiter, ses parents ont accepté que l’hôpital de Toulouse prélève son cœur, son foie, ses poumons, son pancréas, ses reins, ses cornées et même de la peau. A Nancy, en voyant ces transplantés pleins de vie, Elisabeth Totaro, la mère d’Audrey, est sûre d’avoir fait le bon choix : “Grâce à elle, je sais que 7 ou 8 adolescents ou jeunes adultes vivent.”

“Les gens ont la preuve qu’on peut être greffé et avoir une vie normale, faire du sport à son niveau, et travailler, commente le docteur Ruddy Richard, médecin en physiologie du sport au CHU de Strasbourg (Bas-Rhin) et membre de la commission médicale de Trans-Forme, l’association relais en France de la Fédération. Cela change le regard sur la transplantation. Si cela peut aider à une prise de conscience de la nécessité du don d’organe…”

Tout Nancy joue le jeu. Installé en plein centre de la ville, le Village des Jeux, sorte de point de ralliement des participants répartis sur plusieurs sites de l’agglomération, abrite le “forum médical permanent”. Sur place, des associatifs, des bénévoles, des membres du corps médical informent le public. 7 500 jeunes des collèges du département se sont impliqués dans l’élaboration d’une Charte du don.

L’information est en effet nécessaire. La France connaît un important écart entre le nombre de greffes souhaitables et celui des greffons disponibles. Au 31 décembre 2001, l’Etablissement français des greffes (EFG) recensait 6 348 patients en attente de greffe d’organes. S’y ajoutent au cours de l’année les patients nouvellement inscrits : 4 449 personnes en 2002. Au total, plus de 10 000 personnes attendaient donc une transplantation en 2002.

La greffe de rein est la plus demandée : 5 227 patients restaient inscrits au 31 décembre 2002 et la liste s’allonge régulièrement. Viennent ensuite le foie (438 inscrits au 31 décembre 2002), le cœur (355), le pancréas (193) et les poumons (158 inscrits).

La création de l’EFG, en 1994, a permis d’inverser la tendance au déclin de l’activité de prélèvement en France. “En 2002, nous avons atteint l’objectif de passer de quinze à vingt prélèvements par million d’habitants. En dehors de l’Espagne qui a de meilleurs résultats, nos voisins ont des taux analogues”, atteste le professeur Didier Houssin, directeur général de l’EFG depuis sa création et qui s’apprête à quitter son poste, au profit de Carine Camby, nommée le 21 juillet.

Le début de l’année montre cependant “un léger tassement, de l’ordre de 3 % ou 4 %”, précise le professeur Houssin. Il est, selon lui, “avant tout imputable à des difficultés d’organisation des personnels médicaux et paramédicaux à l’hôpital plus qu’à la diminution des morts par accidents sur la voie publique”. Un effort de sensibilisation des équipes hospitalières a été accompli. “Au cours des sept dernières années, le recensement des personnes en état de mort encéphalique a progressé de 43 %”, indique l’EFG.

La greffe se heurte aussi à un taux d’environ 30 % de refus de prélèvement d’organe. De même, trop de donneurs potentiels âgés ne font pas l’objet de prélèvement.

Pour l’EFG, deux messages dominent. Le premier vise à inciter les personnes ayant pris une décision, favorable ou hostile, au don d’organes en cas de décès à en faire part à leurs proches, afin que ceux-ci puissent agir en conséquence. Le second doit rappeler aux équipes médicales que la mort cérébrale ne concerne pas que les patients jeunes. “Le foie, la cornée ou les reins d’un donneur âgé de 60 à 70 ans donnent une autonomie tout à fait satisfaisante au receveur”, indique M. Houssin.

Paul Benkimoun et Monique Raux (à Nancy)

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