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IRC, de l’enfant à l’adulte

30 septembre 2003, Le Quotidien du Médecin

5e Réunion commune de la Société de néphrologie et de la Société francophone de dialyse. Nancy, 30 sept.-3 oct. 2003.

Les progrès techniques de la dialyse, l’érythropoïétine recombinante, l’hormone de croissance, un meilleur accès à la transplantation et les traitements immunosuppresseurs ont profondément modifié le pronostic des enfants insuffisants rénaux chroniques. Avec l’amélioration de la prise en charge éducative, psychologique et diététique, ces jeunes patients bénéficient aujourd’hui d’une meilleure qualité de vie et atteignent une taille adulte acceptable. Reste le problème des complications cardio-vasculaires, qui impose une lutte précoce et vigilante contre les facteurs de risque dès le plus jeune âge.

Le premier progrès dans la prise en charge des enfants atteints d’insuffisance chronique a été leur prise en charge. En effet, jusqu’au début des années 1970, l’issue était fatale et beaucoup considéraient que leur proposer une dialyse relevait d’un acharnement thérapeutique. L’amélioration des techniques de dialyse, qui a permis une réduction sensible de la durée du traitement hebdomadaire et une meilleure tolérance, a donné la possibilité d’étendre ses indications. Depuis quelques années, la prise en charge des nourrissons est même devenue envisageable. La transplantation rénale s’est développée grâce aux progrès des traitements immunosuppresseurs. Récemment, le principe de priorité pour les enfants de moins de 16 ans a permis de réduire les délais d’attente et même, pour certains, d’éviter le passage par le stade de dialyse.

La mise à disposition de l’érythropoïétine recombinante a transformé la vie de ces jeunes patients, qui, au prix de transfusions répétées, d’une surcharge en fer, sans parler du risque viral, souffraient d’une grande fatigabilité. L’hormone de croissance obtenue par génie génétique a, quant à elle, transformé leur pronostic statural. Plus tôt l’hormonothérapie est mise en route, meilleur est le pronostic de taille. Une étude récente a montré qu’avant l’arrivée de l’hormone de croissance la taille finale des enfants, dont l’insuffisance rénale avait commencé avant 16 ans, était inférieure à 2 déviations standards pour environ 45 % des enfants. Dans la série de la Société française de néphrologie pédiatrique, pour les enfants traités par hormone de croissance, le gain de croissance est de 9,3 +/- 2 cm la première année et de 7,4 +/- 1,6 cm la deuxième année, pour une croissance annuelle avant traitement de 5,1 +/- 2,1 cm. Il faut noter qu’un certain nombre de facteurs interviennent sur la taille définitive : la maladie causale, l’âge au moment de la survenue de l’insuffisance rénale terminale, la qualité des apports nutritionnels. Une taille finale supérieure à – 2 déviations standards peut être espérée si le traitement est instauré précocement, avant un déficit trop important.

Une meilleure maîtrise des problèmes nutritionnels et phosphocalciques a également contribué à l’amélioration de la qualité de vie et du devenir des enfants dont la réhabilitation et l’insertion socioprofessionnelle doivent être maintenant la règle.

Simultanément, l’accompagnement de l’enfant et de sa famille s’est amélioré grâce à la coordination des compétences de divers professionnels : diététiciennes, enseignants, travailleurs sociaux, pédopsychiatres, psychologues… La prise en charge globale inclut l’éducation, la scolarité, la formation professionnelle et, bien entendu, l’équilibre psychologique ; elle permet, au-delà de la restauration physique du déficit rénal, grâce à la transplantation, une authentique réhabilitation et la potentialité d’une vie adulte sensiblement normale sur les plans familial et professionnel. Le soutien familial reste fondamental.

Limiter les conséquences

Un certain nombre de problèmes restent néanmoins à résoudre. D’abord, celui de la morbidité cardio-vasculaire à long terme. Le risque lié aux troubles du métabolisme phosphocalcique, qui favorisent les dépôts calciques dans les vaisseaux, à l’hyperlipémie et à l’hypertension artérielle est notable. Il faut donc une prise en charge minutieuse le plus précoce possible pour limiter au mieux aussi les conséquences ultérieures de la maladie. Comme pour d’autres pathologies, l’absence d’évaluation spécifique chez l’enfant et le manque de préparations galéniques adaptées constituent une sérieuse difficulté dans la prise en charge efficace de ces facteurs de risque.

Les progrès ne doivent pas non plus occulter la lourdeur des moyens à mettre en oeuvre, l’investissement familial nécessaire et le vécu des jeunes patients. Ils ne peuvent faire oublier l’inégalité des chances existant, pour cette maladie comme pour d’autres, selon les pays et les milieux où naissent ces enfants.

Dr Marine JORAS

D’après un entretien avec le Dr Jean-Luc André, Nancy.

Des étiologies différentes de celles de l’adulte

Chez l’enfant, les uronéphropathies constitutionnelles sont prépondérantes (entre 65 et 70 %). Une analyse exhaustive, réalisée en Lorraine en 1995, a montré que les hypo- et les dysplasies constituaient 11 % des causes d’insuffisance rénale chronique chez l’enfant, les uropathies, entre 25 et 30 %, les néphropathies héréditaires, entre 16 et 20 %, les glomérulopathies, entre 22 et 30 %, et les anomalies vasculaires, environ 5 % (10 % pour toutes les autres causes confondues).
La forte proportion de causes malformatives explique les atteintes extrarénales associées.

Prévalence et incidence

L’enquête menée par l’EDTA (European Dialysis and Transplant Association), dont la dernière mise à jour date du 1er janvier 1994, montre que, en France, la prévalence de l’insuffisance rénale chronique était de 1 778 patients pris en charge avant l’âge de 15 ans. En valeur absolue, pour l’année 1994, notre pays comptait, après le Royaume-Uni, le plus grand nombre de nouveaux enfants pris en charge par dialyse ou transplantation, soit un taux de six par million d’enfants.
Ces chiffres sont sans doute sous-estimés, les nouveaux cas annuels seraient de l’ordre de sept à huit par million d’enfants. Depuis 1989, on observe une tendance à la stabilisation ou à la baisse relative du nombre de nouveaux patients âgés de 10 à 15 ans, et une augmentation du nombre de nourrissons de moins de 2 ans.

La survie

La survie en insuffisance rénale terminale a beaucoup progressé. Elle est maintenant supérieure à 95 % à 5 ans et de 92 % à 15 ans, pour les enfants de plus de 2 ans. Pour l’ensemble de la France, entre 1985 et 1996, sur un total de 1 117 transplantations effectuées avec des reins de donneur en état de mort cérébrale, la survie des greffons était de 84 % à un an, de 68 % à 5 ans et de 52 % à 10 ans. Les résultats sont meilleurs pour les 146 transplantations de rein provenant de donneurs vivants apparentés : 93 % à un an, 81 % à 5 ans et 71 % à 10 ans. Une survie plus longue des greffons est attendue avec l’utilisation des nouveaux immunosuppresseurs.

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