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Les pharmaciens vont être payés pour nous conseiller

Les pharmaciens vont être payés pour nous conseiller

Bientôt, après avoir consulté un médecin, vous pourrez retourner voir, pour le suivi du traitement… votre pharmacien. En sus de délivrer des médicaments, les pharmaciens vont en effet assurer davantage de missions de prévention, de dépistage, de suivi des patients et d’éducation thérapeutique au nom de la loi HPST (hôpital, santé, patients, territoire) de 2009.

“Les besoins des patients ont évolué : ils sortent plus tôt de l’hôpital et suivent, à domicile, des traitements de plus en plus lourds et sensibles, pour des maladies chroniques, explique Gilles Bonnefond, secrétaire général de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine. Il faut donc les accompagner davantage pour éviter des abandons de traitement ou des situations de crise qui mènent aux urgences.”

A partir de cet automne, les officines pourront assurer le suivi de quatre types de patients : ceux atteints d’une angine, celles qui nécessitent une pilule du lendemain, et ceux qui sont sous des traitements anti-coagulants ou des substituts à la drogue (méthadone, subutex). Par la suite, les pharmaciens prendront aussi en charge les patients atteints d’autres maladies chroniques.

Ces conseils prendront le nom “d’entretiens pharmaceutiques” et non de consultations, pour ne pas froisser les médecins. “Pendant un quart d’heure, le professionnel de santé s’entretiendra avec le patient dans un espace spécialement aménagé pour voir s’il a bien compris son traitement, s’il l’applique correctement et s’il s’avère bien adapté. S’il détecte une réaction anormale, en revanche, il en réfèrera au médecin pour faire évoluer le traitement”, précise Gilles Bonnefond.

Au-delà de l’intérêt du patient, le but de cette réforme est de diversifier le mode de rémunération des pharmaciens. Actuellement, les 22 000 officines françaises reçoivent une rémunération au forfait (0,53 centime par boîte de médicament), à laquelle s’ajoute un pourcentage du prix de vente : 26,1 % pour les médicaments de moins de 22,90 euros, 10 % pour ceux compris entre 22,90 et 150 euros et 6 % pour ceux supérieurs à 150 euros. Au total, les revenus des pharmacies proviennent à 25 % du forfait fixe et à 75 % de la marge commerciale.

Mais chaque année, l’Etat, qui cherche à combler le trou de la Sécu, baisse le prix des médicaments remboursés. C’est l’industrie pharmaceutique qui est visée, mais les officines sont touchées par ricochet. La crise entraîne aussi une diminution de la consommation et donc des volumes écoulés par les officines, seul levier pour maintenir leurs marges. Résultat : une baisse de 4 % des revenus des pharmaciens l’an dernier et 100 officines fermées sur le territoire, une situation certes marginale, mais inédite.

“Sur 28 % des ordonnances délivrées, notre rémunération est inférieure à 2,50 euros, ce n’est pas sérieux”, déplore Gilles Bonnefond, citant l’exemple de la pilule du lendemain : “Aujourd’hui, nous percevons seulement 1,81 euro pour délivrer la pilule du lendemain à une adolescente, qui nécessite tout un travail d’éducation.”

Plusieurs types de rémunérations, remboursées par la Sécu, sont prévus par la nouvelle convention.

  • Des “honoraires de dispensation”, d’abord, rémunèreront le conseil donné par le pharmacien au moment de délivrer des médicaments. Ordre de grandeur évoqué : 1 euro pour les ordonnances pour lesquelles la rémunération de l’officine est actuellement inférieure à 2,5 euros.
  • Les entretiens pharmaceutiques, ensuite, pourraient être rémunérés soit à l’acte soit par un forfait annuel par patient.
  • Enfin, les pharmaciens seraient aussi rémunérés sur d’autres objectifs, tels que la part de génériques délivrés ou la vaccination anti-grippale.

L’objectif, d’ici à cinq ans, serait qu’un quart des revenus des officines soit constitué par ces nouvelles rémunérations, afin de limiter la part de la marge commerciale et la course au volume. Sur la délicate question de savoir qui va payer, la négociation en cours doit fixer le partage de ces sommes entre l’Assurance maladie et les complémentaires. 

D’après Audrey Garric, Le Monde du 16 mars 2012


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