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Lupus : 20% des patients ont une atteinte rénale qui peut conduire en quelques années à une insuffisance rénale

Lupus : 20% des patients ont une atteinte rénale qui peut conduire en quelques années à une insuffisance rénale

C’est la plus fréquente des maladies rares, elle concerne 20.000 à 30.000 personnes en France et touche 9 femmes pour 1 homme, souvent jeunes (elle débute typiquement entre 20 et 40 ans, mais apparaît dans 5% des cas dès l’enfance,). Le lupus érythémateux systémique, ou LES*, tire son nom d’un symptôme typique qui n’est pourtant présent que chez 60% des malades : une rougeur ou un érythème du visage en forme de masque de loup, couvrant les pommettes, les ailes du nez, le front et le pourtour des yeux.

Cette maladie auto-immune, où le système immunitaire déréglé se retourne contre les propres cellules du sujet, est dite systémique car elle peut toucher n’importe quel organe. Son pronostic reste sévère, mais s’est beaucoup amélioré en quelques années.

Quand la maladie s’exprime sur la peau, il est parfois difficile de différencier les atteintes du lupus systémique et celles d’une autre forme de lupus, purement cutané et bien plus bénin.

La maladie s’exprime de façon très diverse. Le seul signe constant est, parmi diverses anomalies immunologiques, la présence d’anticorps antinucléaires (dirigés contre le noyau des cellules) systématiquement recherchés lors du diagnostic. Mais si leur absence exclut un lupus systémique, leur présence ne suffit pas à l’affirmer, car ils sont présents aussi dans d’autres circonstances.

«Les manifestations les plus fréquentes du lupus systémique, cutanées et articulaires, sont présentes chez 80% des malades cinq ans après le diagnostic», explique le Pr Zahir Amoura, responsable du Centre national de référence du lupus (CHU Pitié-Salpêtrière, Paris). Elles se traduisent par des atteintes cutanées (masque de loup et/ou plaques rouges discoïdes) et souvent un rhumatisme inflammatoire siégeant surtout aux mains et aux poignets. Considérée comme assez bénigne, car ne touchant aucun organe vital, cette forme cutanéo-articulaire est bien contrôlée par le traitement. Souvent, une photosensibilité aux UV aggrave la maladie.

Moins fréquentes, les lésions d’organes sont aussi plus graves. «20% des patients ont une atteinte rénale qui peut conduire en quelques années à une insuffisance rénale. Assez fréquente aussi, l’atteinte des membranes séreuses recouvrant le cœur ou les poumons peut provoquer une péricardite ou une pleurésie, désormais bien traitées. Des troubles hématologiques, anémie ou baisse des plaquettes, surviennent parfois, et plus rarement des atteintes du système nerveux central, pouvant aller jusqu’à une psychose, précise le Pr Éric Hachulla (CHRU Lille). L’entrée dans la maladie peut se faire par n’importe quelle atteinte d’organe et être grave d’emblée. Quand elle débute par la forme cutanéo-articulaire, celle-ci sera souvent isolée, mais le risque d’atteinte viscérale, notamment rénale, reste important, surtout les cinq premières années».

Le lupus évolue par poussées. «En moyenne, chaque malade fera deux poussées durant sa vie, la seconde pouvant se produire dix à quinze ans après la première. C’est donc vraiment une maladie chronique, dont la prise en charge doit être régulière et suivie», insiste le Pr Amoura.

Maladie multifactorielle, le lupus résulte de la rencontre d’un terrain particulier et de facteurs de l’environnement. Ses mécanismes sont complexes et varient probablement d’un malade à l’autre. Des variants de nombreux gènes, en modifient un peu leur fonction, induisent une susceptibilité génétique. «Ils gouvernent des cytokines assurant la communication entre cellules, tel l’interféron alpha, des éléments du complément sérique, impliqué dans la réponse immunitaire, des récepteurs des lymphocytes… Les gènes liés à l’épuration des corps apoptotiques sont aussi impliqués: le processus qui élimine ces débris de cellules mortes est souvent déficient chez les malades lupiques», explique le Pr Jean-Yves Viallard (CHU Bordeaux). Ces variants confèrent un terrain propice à développer un lupus.

Mais cela ne suffit pas. «Sur ce terrain doivent aussi intervenir des facteurs d’environnement. L’exposition aux UV, en détruisant des cellules de la peau, va exposer plus de débris cellulaires à un système immunitaire déjà défaillant qui a tendance à fabriquer des auto-anticorps dirigés contre le noyau des cellules, ce qui va l’activer et déclencher une poussée. Idem pour des infections virales banales, comme le virus d’Epstein-Barr ou le cytomégalovirus», explique le médecin.

Quant aux hormones féminines, «les œstrogènes favoriseraient la production d’anticorps anti-ADN, d’où la recrudescence du lupus pendant la grossesse, alors qu’il s’atténue après la ménopause», ajoute le Pr Amoura. Aujourd’hui, le lupus n’interdit plus une grossesse. Certains médicaments, antiépileptiques, bêtabloquants, anti-TNF, etc., peuvent lors d’un traitement prolongé induire un lupus qui régresse souvent après son arrêt.

Le traitement du lupus a beaucoup progressé, et la surmortalité infectieuse et rénale due à la maladie s’est effondrée en trente ans, même si une surmortalité cardio-vasculaire persiste. Son évolution reste aléatoire, et ses conséquences potentiellement graves justifient un traitement rigoureux qui vise à en contrôler les effets en s’appuyant, de plus en plus, sur la compréhension accrue de cette maladie énigmatique et sur des centres de compétence dédiés.
* On l’appelle aussi lupus érythémateux disséminé ou lupus érythémateux aigu.

D’après Martine Lochouarn – le Figaro du 28/03/2012

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